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Pour une démocratie continue

Le système politique dans lequel nous sommes, la démocratie représentative, ne fonctionne pas très bien. Le résultat du premier tour de l’élection présidentielle qui a eu lieu hier avec 26,31% d’abstention le démontre une fois de plus encore.

Le journal Le Monde du 4 avril 2022 décrivait « Les espoirs déçus de la démocratie participative » (1). Y aurait-il un système de « rechange » ? Si « oui », lequel et comment le mettre en place localement ?

Les défauts de la démocratie représentative

Démocratie participative
La démocratie représentative : un système démocratique à bout de souffle

La démocratie représentative est un système politique dans lequel une assemblée restreinte (Assemblée nationale et Sénat pour la France, conseil municipal pour la commune) représente le peuple ou une communauté et prend les décisions la concernant. Cette assemblée monopolise la fabrication des lois et des décisions à la charge des seuls représentants, les élus.

Cette manière de faire semble atteindre ses limites aujourd’hui.

Cela se concrétise de deux manières :

  • l’abstention électorale est de plus en plus forte : environ 50% lors de la dernière élection municipale à Montferrier, aux élections législatives : 21,5% en 1986, 51,3% en 2017 ; 66,7% aux élections départementales et régionales en 2021, un record absolu;
  • depuis une vingtaine d’années, les mouvements sociaux ou revendicatifs sont de plus en plus violents, en témoignent, notamment, le mouvement des « Gilets jaunes » et les tensions en Corse ou en outre-mer dernièrement.

La démocratie continue : une nouvelle voie ?

La démocratie continue pourrait être une autre façon de faire fonctionner la démocratie.

Démocratie continue
La démocratie continue : une nouvelle voie

Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel, développe cette idée depuis les années 90 (2). Il estime que nous sommes au bout d’un cycle, celui d’une démocratie représentative pensée à la fin du 18e siècle, qui ne reconnaît au citoyen que la compétence d’élire des représentants qui vont décider pour lui. Un autre cycle s’ouvre. Il a pour principe la compétence des citoyens, c’est-à-dire leur capacité d’intervenir dans la fabrication des lois et des politiques publiques.

Le débat politique est enfermé depuis des siècles dans une alternative (entre « la rue » et « les urnes ») qui a pour point commun de faire l’impasse sur la notion de citoyen.

Le citoyen
Le citoyen au centre de toutes les attentions

Le citoyen d’abord

L’idée de la démocratie continue repose sur la conviction que l’acte citoyen n’est pas terminé avec l’acte de voter et donc qu’il continue entre deux moments électoraux.

Les citoyens ne sont pas des intermittents de la démocratie, ils doivent exercer leur métier de citoyen entre-temps, avec d’autres mécanismes que le vote. Par exemple, adhérer ou participer à une association ou à des conseils de quartier, signer des pétitions, faire des actions en justice : Tous ces mécanismes doivent permettre à la population d’exercer une fonction de surveillance sur les élus, que ces derniers ne profitent pas de leur position. Le citoyen doit donc avoir les moyens de surveiller, mais aussi d’intervenir sur les élus pour leur demander de fixer des règles nouvelles. Les élus résistent et les citoyens ne savent pas trop comment procéder, mon travail consiste donc à établir un état de la situation et d’essayer d’imaginer des mécanismes, de trouver cette articulation nouvelle pour les deux actions, qui sont légitimes

Dominique Rousseau (3)

Le projet de Dominique Rousseau porte essentiellement sur la démocratie continue au niveau national. Le prochain projet de Dominique Rousseau sera probablement plus axé sur la démocratie continue au niveau local et dans le monde.

Donc, comment véritablement agir au niveau local, tant communal que métropolitain, deux instances composées d’élu(e)s qui décident et qui ont toutes les compétences pour agir ?

Les idées ne manquent pas mais ce sont plutôt les citoyens qui paraissent parfois en retrait. Certains estiment déjà que voter ne sert à rien et s’abstiennent. D’autres estiment que tout est joué d’avance et qu’il ne sert à rien de s’investir puisque les politiques, les personnes au pouvoir en font à leur guise, font des promesses qu’ils ne tiennent pas après leur élection. Enfin certains proposent, à l’instance de ce qui se pratique en Suisse et au Liechtenstein (avec l’initiative populaire et le référendum facultatif), une démocratie directe où les citoyens exercent directement le pouvoir, sans l’intermédiaire de représentants élus.

Certes, nombre de bénévoles participent à faire vivre des associations : la guerre en Ukraine en est une magnifique démonstration. L’élan de générosité qui a jailli en a démontré toute la force.

Au niveau métropolitain, certaines associations se font entendre et agissent. À l’instar de l’association Vélocité Grand Montpellier, qui rassemble, défend les cyclistes et améliore leur sécurité. Vélocité promeut l’usage du vélo dans le Grand Montpellier pour une ville plus humaine.

À d’autres niveaux, cela reste également axé sur des actions ciblées :

  • « SOS Lez Environnement », association de défense de l’environnement de la vallée du Lez, l’association prévient toute forme de pollution et veille au respect des règles d’urbanisme
  • « Les Amis de la Chapelle de Baillarguet » qui a pour objet d’animer ce beau site et d’y développer des activités culturelles.

Bien sûr, les veilles et les actions menées par ces associations sont fondamentales et mènent d’ailleurs à des résultats encourageants. L’arrêt du projet « Oxylane », grand complexe ludique et commercial aux portes de Montferrier, en est un exemple démonstratif.

Pourtant tout cela ne suffit pas. Au niveau purement communal, les associations qui voudrait faire vivre la démocratie (« Vivons Montferrier » et « Montferrier Ensemble ») sont jugées comme « politiques » et mises très largement « sur la touche » par la majorité en place. D’où une sensation de dialogue complètement inexistant.

Propositions pour une démocratie continue locale

Nous listons ici un certain nombre de propositions que nous avions fait pendant notre campagne et auxquelles nous croyons.

Démocratie locale avec des conseils élus

1 – Conseil des Sages

Conseil des Sages

à parité Femmes/Hommes – parmi la population de + 60 ans (à la retraite), il comprendrait 10 personnes, soit ayant eu des fonctions électives ou représentatives, soit élu(e)s parmi les personnes qui se présenteraient.

2 – Conseil des quartiers

Conseil des quartiers

La commune serait divisée en quartiers qui aurait chacun un représentant élu et un suppléant – une femme/un homme.

3 – Conseil des représentants de la vie active

Conseil de la vie active

Il comprendrait 10 personnes en activité, élues parmi les personnes actives (entrepreneur(e)s ou salarié(e)) qui se présenteraient : un titulaire et un suppléant – une femme et un homme, un actif travaillant à Montferrier, un actif travaillant en dehors de Montferrier.

4 – Conseil des jeunes

Conseil des Jeunes

Membre âgé de 15 à 24 ans [classification selon l’ONU Organisation des Nations Unies ou selon les sciences humaines] ce conseil comprendrait 10 personnes – à parité homme / femme – élues parmi les personnes qui se présenteraient.

Chaque conseil élirait un Président, se réunirait au moins une fois par an, ferait remonter les problèmes et questionnements issus de leurs réunions.

Le « Grand Conseil » soit l’ensemble des membres des différents conseils (46 personnes) aurait une réunion annuelle avec Mme la Maire, les adjoints et un membre de chaque groupe d’opposition (soit 17 membres) ou avec l’ensemble du conseil municipal (soit 27 membres) pour discuter, proposer et faire avancer les projets, proposer des solutions pour trouver des solutions face aux problèmes à résoudre. Il serait public et ouvert. Ce grand conseil serait une instance de discussion et de proposition. Une évolution vers une instance de décision pourrait être prévue dans un moyen terme si l’engagement citoyen était dynamique.

Nous sommes conscients que cette mise en place peut s’avérer lourde et difficile à mettre en œuvre. Mais d’une part, qui ne tente rien n’a rien, et, d’autre part, cela pourrait être mis en place progressivement, en faisant un essai avec un seul type de conseil par exemple (au choix parmi les 4).

Démocratie locale avec des réunions d’information et de concertation

Comme proposé par nombre des listes lors des élections municipales, pourraient être mis en place des réunions publiques ou, tout au moins, des espaces de concertation avec la population, au moins une fois par an.

Nous reprenons ici les propositions faites pendant la campagne par les 3 listes :

  • « Une réunion publique par an au Devézou pour tous les habitants de Montferrier afin d’informer sur les projets : discussions, échanges » (liste « Montferrier Ensemble ») ;
  • « Instaurer des concertations avec les Montferriérain(e)s sur les grands projets du village » (liste « Avec Vous pour Montferrier ») ;
  • « Assurer la concertation citoyenne en créant des commissions extra-municipales où siègeront élus, représentants des associations et citoyens sur les thèmes : environnement, urbanisme, école, action sociale, transport » et faciliter l’émergence d’idées et de projets à travers des ateliers citoyens et des débats » (liste « Vivons Montferrier »).

Pour l’instant, ces propositions sont restées lettre morte par l’équipe municipale en place.

Démocratie locale avec le support du numérique

Le numérique est entré dans nos vies quotidiennes : il fait partie des gros bouleversements du XXIe siècle. Que pourrait-il nous apporter pour rendre plus vivante notre démocratie ? Quel pourrait être l’usage des outils numériques dans le domaine de la participation citoyenne ?

Certes il convient de ne pas mystifier les outils numériques, de penser qu’ils induisent des formes radicalement différentes d’exercice de la démocratie, mais à l’inverse on ne peut pas nier leurs effets politiques

Ornella Zaza – Docteur en Aménagement et Urbanisme – 4

Voici quelques unes de nos propositions :

  • Mise en place d’une plateforme Imaginons Montferrier pour une concertation sur les grands projets, avec des fonctionnalités particulières, qui rendent par exemple possible, le partage de dessins ou de photos. L’animation de la plateforme devient alors centrale.
  • Mise en place d’un outil de pétition / votation en ligne.
  • Le Budget Participatif où la mairie laisse au vote 5 % de son budget, qui doit être utilisé pour les projets des habitants (exemple dans la commune de Clapiers).

La démocratie numérique n’est pas un modèle miracle

La démocratie numérique peut apporter beaucoup.

Pour le citoyen d’abord c’est une manière de s’éduquer à la citoyenneté, d’avoir une meilleure compréhension du fonctionnement d’une collectivité, d’avoir plus confiance en l’action publique car le numérique permet une transparence (réclamée) et une facilité à pouvoir donner son avis.

Pour la collectivité, les bienfaits sont tout aussi précieux : ces outils peuvent permettre de surmonter des conflits, faciliter l’appropriation, d’agir sur le lien social, de moderniser la collectivité, d’améliorer son image auprès des citoyens …

Mais il y a des idées reçues autour de ce sujet.

  • Les collectivités pensent toucher une plus grande diversité d’habitants mais ce n’est pas le cas car le public qui participe en numérique s’intéresse souvent déjà à la politique.
  • Le numérique n’est qu’un outil qui peut venir en complément de la vie démocratique locale existante. Ces outils peuvent renforcer « la division de la population » ou que certains se sentent frustrés de ne pas avoir accès à cela.
  • C’est une grande limite de cette participation numérique» (5 et 6). Le déploiement, dans le cadre de France Services, de 4 000 conseillers numériques dans les territoires qui pourraient avoir un rôle de médiateur sur la concertation numérique et la co-construction de projets municipaux.

À chacune, à chacun maintenant d’intervenir, de nous laisser un commentaire, de critiquer mais en faisant des propositions constructives.

Nous attendons avec intérêt votre participation afin de faire vivre notre commune de manière plus active.

Nous vous remercions par avance de celle-ci.

Références

(1) Le Monde – 4 avril 2022 – « Les espoirs déçus de la démocratie représentative » [En ligne]
(2) Dominique Rousseau : « La démocratie continue : fondements constitutionnels et institutions d’une action continuelle des citoyens » – Confluence des droits – La revue [En ligne]
(3) « A Belforêt-en-Perche, Dominique Rousseau publie son nouveau livre : Six thèses pour la démocratie continue », 20 mars 2022, par Mathilde Simoën [En ligne]
(4) Le numérique pour renouveler la démocratie locale ? Le point de vue d’Ornella Zaza [En ligne]
(5) Le numérique pour transformer la démocratie locale Guide pratique téléchargeable. Florence Durand-Tornare, Pascal Nicolle, territorial éditions – Février 2017
(6) Le numérique : un levier pour revivifier la démocratie locale – 3 décembre 2021 [En ligne]
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